Terminé en mai 2012
Gamni est un village dogon très ancien situé au sommet d’une colline pierreuse et surplombé par une immense falaise de plusieurs centaines de mètres de hauteur. Au dernier recensement, il comptait 1 098 habitants répartis dans quatre hameaux proches les uns des autres. Gamni est réputé pour ses guérisseurs traditionnels « redresseurs de bossus ». En août 2010, nous y avons rencontré un malade venu de Bamako, situé à 900 kilomètres de là, pour se faire soigner. Quand il était arrivé, ses jambes ne le portaient plus, il ne sentait plus ses pieds et ses bras étaient quasiment paralysés. Après deux mois de soins, il se tenait debout seul, appuyé sur une canne ; et il était rayonnant, certain qu’il allait pouvoir bientôt marcher à nouveau.
La vie est particulièrement difficile pour les habitants de Gamni. Les environs du village ne sont guère cultivables car ils sont parsemés de pierres et de rochers de toutes tailles. Les villageois doivent donc descendre dans la plaine pour cultiver leurs champs. Certains font l’aller-retour chaque jour, d’autres restent sur place, vivant dans des abris de fortune.
Pendant la saison sèche, beaucoup de villageois travaillent le coton : les femmes filent et font la teinture tandis qu’une centaine d’hommes font le tissage. Cette activité, peu lucrative, est délaissée par les plus jeunes qui quittent le village après les récoltes pour aller travailler au loin, à Bamako pour la plupart d’entre eux.
Cet exode saisonnier était aggravé par les problèmes d’eau. Les quatre quartiers s’approvisionnaient à trois points d’eau alimentés par des sources dont le débit diminue au fil de la saison sèche. Au moment de notre visite en février 2011, il fallait une demi-heure pour remplir un seau en raclant la roche avec une calebasse. Cette rareté de l’eau provoquait de vives tensions et il n’était pas rare qu’une tierce personne dût intervenir pour séparer deux femmes qui revendiquaient la priorité. La situation du village s’aggravait à partir de mars car les trois sources sont taries. Il fallait alors aller chercher l’eau au puits de Dianwéli Maoundé, ce qui représentait un trajet de trois heures de marche. Le trajet retour était particulièrement éprouvant car il fallait remonter au village en portant un seau lourd de quinze litres d’eau par un chemin escarpé et rocailleux. Pour éviter l’affluence et les conflits qui en résultaient avec les femmes de Dianwéli Maoundé, les femmes de Gamni allaient chercher l’eau après leurs travaux de filage du coton très tard le soir ou se levaient bien avant l’aube, à trois heures du matin.
Les villageois avaient essayé de creuser un puits il y a quelques années, mais ils étaient rapidement tombés sur une roche très dure qui résistait à leur barre à mine. Ils nous ont contactés en août 2010 par l’intermédiaire du maire de la commune de Dianwéli, Oumar Ongoïba, dont dépend leur village.
Le creusement de ce huitième puits a été décidé à notre assemblée générale du 30 septembre 2011 et les travaux ont commencé en novembre 2011 pour se terminer en mai 2012. La durée exceptionnellement longue de ce chantier s’explique par deux raisons; le grave accident qui a coûté la vie à deux ouvriers de l’entreprise de Moussa fin janvier et la situation au Mali. Ce projet n’aurait pu aboutir sans la détermination et le courage de Moussa. Après la prise de contrôle de Douentza par le MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawad) puis par les islamistes du MUJAO, il devait parcourir plusieurs centaines de kilomètres à travers la brousse chaque fois qu’il se rendait à Gamni pour diriger le chantier.
Les habitants ont maintenant un puits à côté de leur village : la profondeur d’eau y est de plusieurs mètres avec un bon débit de la nappe, même à la fin de la saison sèche. Les villageois de Gamni peuvent donc maintenant compter sur une eau pérenne.